La grotte

Regarder Noc s'occuper d'un peu tout le monde la rassura..
Elle put enfin prendre le temps de s'asseoir car elle savait très bien pourquoi Rhys pleurait..
Sans doute pour la même raison que la jeune demoiselle, dont on venait de lui expliquer les aventures..
Berçant doucement son fils, elle laissa Noc se charger aussi de Miellye qui en avait grandement besoin..
Et délicatement délaça une partie de sa robe pour que Rhys puisse manger à son aise, tout en essayant de ne pas se sentir mal à l'aise...

Ha toi, mon petit affamé...
Je t'aime.. Mange doucement..

Relevant la tête vers Noc..

Si vous avez besoin de quelque chose, demandez..
Je verrais ce que je peux faire...

Toujours dépassée par les évenements, elle savait qu'elle devait avoir une tête pour aller avec..
Mais, se composer un air serein n'était pas son fort quand elle était fatiguée et aussi entourée par ce qu'elle ne saurait complètement gérer..
Avoir Rhys dans les bras et lui si calme, acheva toutefois de la calmer et de lui remettre les idées en place...
Il avait ainsi un air... un air de ressemblance frappant avec son père...

Pendant qu'on s'occupait de tout le monde… Miellye jonchant toujours sur la pierre froide de la grotte, revint à nouveau à elle puis, parvint enfin à s'asseoir et reprit peu à peu ses esprits.

Miellye prit la serviette laissée par Calli et l'appliqua sur sa tête en essayant prudemment de se relever lorsque son époux arriva, linges propres et pommade en main.

Il pansa sa tête après avoir nettoyé la plaie qui ne saignait plus et il appliqua la pommade d'herbes médicinales. Miellye insista pour qu'il en fasse tout autant sur ses avant-bras franchement bien éraflés!

Pendant qu'il s'occupait de la soigner, il expliqua à son épouse les craintes de Calli qui l'avait trouvée inconsciente et lui demanda si elle était en mesure de nourrir Moka.

Miellye, blanche comme un nuage un jour ensoleillé, ne dit rien et regagna la cuisine au bras de son époux. Elle s'assit auprès de Calli et nourrit Moka que Noctuel lui apporta.

Elle regarda le fils de son amie qui buvait aussi gloutonnement que Moka et lui trouva une petite ressemblance paternelle. Elle la félicita. Il était magnifique! Quel beau prénom tu lui as choisie.

Noctuel revint de l'extérieur où il était allé jeté un œil à tout ce petit monde qui reprenait son calme. Miellye remarqua qu'il avait en main un parchemin et lorsqu'il le lui tendit, elle refusa de le prendre. Les derniers parchemins reçus, avaient tous (ou presque) été porteurs de mauvaises nouvelles…

Noctuel n'insista pas et le lut pour ensuite le ranger sur le comptoir. Il en discuterait plus tard avec son épousée.

Il fit le déjeuner de tout ce petit monde, offrit des petits pains fromagés à Calli et à Miellye qui se régalèrent.

Miellye avait toujours ce mal de tête qui s'estompa peu à peu grâce à une tisane d'herbes fraiches que son époux lui concocta.

Calli, une fois rassurée par Miellye qu'elle n'accoucherait pas maintenant, annonça qu'elle devait retourner chez elle rejoindre son époux, Chloé et la gente féline qui habitait chez elle.

Miellye esquissa un sourire narquois au coin des lèvres lorsqu'elle vit une petite lueur de fuite pointer dans la prunelle des yeux de son amie.

Calli partit, Noctuel se joignit à son épousée après avoir retourné Moka dans son bers et il lui lut la lettre de Bubu.

Tout à coup, Miellye se rappela… L'Italie, le mont Ventoux! Le brasier de ses yeux se ralluma!!!

Mais comment se fait-il que tu ne sois pas au mont Ventoux toi?

Lorsque Noctuel eut tout expliqué à Miellye, celle-ci se leva et entreprit de remplir une besace de toutes sortes de choses utiles à une expédition: linges, serviettes, pommade, nourriture, vêtements de rechanges, etc.

Puis, elle dit à Noctuel:

Tu vas te reposer un peu et repartir à la recherche de Céleste! Sinon mon époux, tu le regretteras toute ta vie! C'est le seul lien qui te rattache, te rappelle dame Caramal à ta mémoire, mis à part tes souvenirs bien sûr! Et puis, elle aurait apprécié que tu agisses ainsi!

Alors je t'en prie, pars! Ne t'en fais pas pour nous ici. Je serai plus prudente et plus sage. Je me reposerai bien. Tu vois...

Et Miellye lui montra son ventre pour l'assurer qu'il allait bien.

Il est possible que nous ayons la visite de Béli et de Al pendant ton absence et si ça te rassure, je lui écris de ce pas de venir me voir ou nous chercher pour aller chez elle. Elle en sera ravie!

Prends Neige avec toi, tu iras plus vite ainsi. N'oublie pas Dark, il adore les randonnées en forêt avec toi! Ça me fera deux soucis de moins. Je m'occuperai bien de ton Arnold et de Coquille!

Voyant que Noctuel hésitait quelque peu, elle lui donna une grosse bise sur la joue tout en passant une main dans ses cheveux pour les ébouriffés un peu, prit un sourire des plus rassurants et lui dit:

Pars sans crainte mon époux! Et si ça peut te rassurer davantage, sache que je suis fière de toi et que je ne t'aime que davantage d'être revenu auprès de nous. Je t'en suis reconnaissante!

Mais pour l'instant le plus important c'est toi! Toi et ta peine que je comprends. Alors si d'aller chercher Céleste peut alléger quelque peu ton chagrin... Vas-y vite alors pour nous revenir tout aussi rapidement!!! Nous attendrons impatiemment ton retour!

Noctuel écouta Miellye et la regarda préparer la besace. Il voyait bien combien son épouse était emplie de bonne volonté mais il n'était pas question pour lui de repartir.

D'ailleurs, il soupçonnait fort son épousée de cacher quelque malaise quand à son état de gravide.

De plus, il avait besoin de bois pour sa boulangerie. Il devait donc retourner bûcher et s'occuper de la production de pains ainsi que de leur mise au marché.

Il se leva et s'approcha d'elle, prit la besace dans ses mains et la déposa sur la table.

Miellye… Miellye, je ne repartirai pas! Je crois d'ailleurs que dame Caramal, sachant la situation préférerait de beaucoup que je demeure auprès des miens plutôt que de courir après un oiseau qui doit déjà être tout près de Calais maintenant.

Je serai fort occupé au cours des prochains jours, mais je préfère rester ici Miellye.

Je me sens d'autant plus rassuré que si tu as besoin, Béli sera là. Je sais combien elle est importante pour toi et vu mes occupations des prochains jours…

Miellye le regarda, le cœur lourd, ne sachant plus que dire. Les simples mots utilisés par Noctuel l'avaient touchée.

Noctuel prit la besace déposée sur la table et s'empressa de remettre chaque chose à sa place avant que son épousée ne change d'idée.

Miellye insista pour que son époux ramène les enfants à l'intérieur, ainsi que Coquille et Arnold.

Il lui sembla, une fois que tous furent auprès d'elle, que la vie reprenait enfin son cours.

Elle porta une main à sa tête qui élançait. Noctuel lui offrit d'aller faire un petit somme pendant qu'il était là. Il surveillerait les enfants et elle pourrait se reposer un peu avant le réveil de Moka et son départ dans la forêt.

Miellye était si fatiguée qu'elle accepta l'offre de son époux et se rendit dans son lit.

Quelques instants plus tard, elle dormait…

Noctuel partit vaquer à ses occupations lorsque Miellye se réveilla et qu'il constatat qu'elle allait mieux.

Sa douleur à la tête était moins forte, il refit le pansement et réappliqua de la pommade.

Il partit donc vers la forêt afin de bûcher quelques stères dont il avait besoin pour le four de sa boulangerie, après que Miellye eut donné le boire à Moka.

Puisque tout était propre dans la grotte, elle se mit à jouer avec les enfants. Ils avaient déjà dix-neuf mois et tout ce petit monde marchait, courait, dansait... Oui, déjà dix-neuf mois! Il lui semblait que c'était hier...

Miellye porta la main à son ventre qu'elle trouvait tout petit cette fois. Un brin de nostalgie l'envahit...

Elle avait mis les grelots à tous les enfants et les avait laissés libres de courir partout dans la grotte, en toute liberté quoi! Même Arnold s'en donnait à coeur joie et pour remercier Miellye, il s'arrêtait parfois lorsqu'il arrivait près d'elle. Comme elle était assise par terre, il frottait sa tête contre ses jambes croisées ce que Miellye trouvait charmant.

Aujourd'hui Popeye semblait plus amoureux que jamais d'Olive. Il ne cessait de la courtiser, émettant des sons ressemblants à des roucoulements et sa belle, fièrement dressée sur son perchoir, ne bronchait pas, se laissant désirer...

Lauzène que tout ceci irritait, vint se percher sur l'épaule de Miellye, cherchant quelque réconfort. Elle lui fit un gros bisou et bien des calins qui finirent par la calmer et rejoignit le dos d'Arnold pour faire une petite promenade au grand plaisir de celui-ci.

Grazielle vint se faire caliner en se plaçant entre les jambes croisées de maman et Noctumiel, suivit d'Imeldine les rejoignirent pour prendre d'assaut chacun une des cuisses de leur mère pour y siéger en roi et reine.

Elle entrouvrit ses bras pour les entourer tous les trois, distribua une série de bisous accompagnés de calins et de chatouilles qui déclenchèrent rires et éclats de voix.

Elle était heureuse auprès des siens, alors pourquoi se sentait-elle si triste se demanda-t-elle ???

Elle s'inquiétait pour son époux ... Elle aurait tant voulue faire plus pour lui. Elle se fit du souci pour Bluenn qui était sur les routes. Elle avait hâte de revoir la petite Aury et espérait que Cambre soit gentille avec elles. Calli et Zarco avaient vraiment un magnifique petit garçon. Chloé devait être heureuse d'avoir un petit frère et Zarco gonflé d'orgeuil d'avoir fait une si belle réussite. Bientôt elle irait les voir à son tour.

Béli et Al étaient revenus depuis quelques jours et Miellye n'osait pas leur écrire pour ne pas les déranger. Quand on revient de voyage... on a besoin de se retrouver un peu seuls... Elle irait aussi les voir bientôt!

Mais pour le moment, elle préférait rester avec sa famille, comme si le départ de dame Caramal lui avait rappelé l'importance du moment présent passé avec les êtres aimés...

Soudain, Noctumiel se leva sur sa cuisse, entoura le cou de sa mère de ses deux petits bras et la serra très fort dans ses bras tout en lui faisant un énorme bisou. Le sourire revint sur le visage de Miellye qui remit au centuple le bisou à Noctumiel sous ses éclats de rire profonds. Alors tout le monde se jeta sur elle et ils roulèrent tous sur le sol chatouillant et embrassant maman qui riait à gorge déployée réclamant une trève qui ne semblait pas prête à venir si on en croyait Dark et Arnold qui se mirent de la partie.

Après avoir beaucoup rit, Miellye prépara un petit goûter pour les enfants puis les déposa dans le parc, malgré leurs protestations.

Elle donna le boire à Moka qui s'endormit aussitôt. Miellye la retourna dans son bers.

Elle s'apprêtait à préparer tranquillement le repas du soir. Elle se sentait à nouveau fatiguée, lasse...

Arnold était près d'elle et réclama une pomme de terre qu'elle lui donna en souriant.

Lorsqu'elle se pencha pour la lui tendre, elle ne put s'empêcher de porter la main à son ventre et de s'asseoir. Une bouffée de chaleur s'empara d'elle accompagné d'une douleur ventrale. Elle respira profondément, attendit un peu et la douleur disparut.

Elle se releva pour reprendre son activité ménagère. Elle sourit à nouveau, repensant à son époux qui serait ravi du copieux repas qu'elle lui préparait. Elle avait soudain envie de le gâter. C'est que malgré sa petitesse, Noctuel avait un appétit d'ogre surtout lorsqu'il revenait de bûcher.

Elle chantait afin de calmer les enfants qui, les bras tendus vers elle, essayaient de l'attendrir pour qu'elle les prenne. Il sembla que leurs gestes démonstratifs fonctionnaient car après avoir terminer de peler les pommes de terre, elle se dirigea vers le parc et se pencha pour prendre Grazielle.

Lorsqu'elle voulut soulever la petite, une nouvelle douleur l'assaillit un peu plus forte que la précédente. Elle redéposa Grazielle au fond du parc, sous les cris et les pleurs de l'enfant déçue, s'insurgeant contre la décision de dernière minute de sa mère qui retourna s'asseoir.

Tous les trois se mirent à crier de plus belle, ce qui réveilla Moka qui accompagna sa nouvelle fratrie, tentant de se faire entendre davantage que les autres.

Miellye demeura calme malgré tout. Elle attendit que la douleur se dissipe puis alla chercher Moka, la déposa dans le panier à linge et l'amena dans la cuisine, près d'elle pour l'installer sur la table.

Elle se rassit, prit la petite dans ses bras, releva sa chemise et y blottit sa fille qui se consola en titillant le mamelon sans toutefois vraiment boire pendant que Miellye la rassurait en lui murmurant des "je t'aime".

Noctumiel qui avait cessé de pleurer pour observer la scène, redoubla d'efforts en constatant que sa soeur était parvenue à obtenir une faveur qui lui faisait très envie, privilège ultime qui lui était à présent refusé.

Miellye se leva et se dirigea vers la petite armoire placée dans le coin de la cuisine, fabriquée par Noctuel et où elle conservait de petites gâteries pour consoler les bobos ou les chagrins.

Elle prit trois calissons qu'elle alla leur remettre tout en tenant Moka fermement dans ses bras.

Noctumiel se mit à loucher, voyant la gâterie se déplacer vers lui. Depuis que Nadhas lui avait apportée cette spécialité de Provence consistant en de petites bouchées en forme de losange et à base d'amande recouvertes de sucre glacé, Noctumiel en était devenu fou! Aussi, démontra-t-il à Miellye son désintéressement maternel, se concentrant sur son calisson qu'il adorait lécher avant de le mettre dans sa bouche.

Miellye regagna sa place, bénissant Nadhas et les calissons. Maintenant le silence était revenu dans la grotte au grand plaisir de Miellye.

Le seul son qui demeurait présent, était celui qui interpelait la maternité de la future mère. Miellye le savait... elle le sentait... le moment n'approchait pas! Il était là, bien présent!

Elle remit Moka dans le panier, regarda les seaux d'eau que Noctuel avait eu la précaution de remplir avant son départ et attisa les flammes dans le feu.

Avec précautions, elle arriva difficilement à les soulever et en s'y prenant doucement elle parvint péniblement à emplir les marmites placées au-dessus des flammes pour y déverser l'eau afin de la faire bouillir.

Cet effort augmenta l'apparition, la régularité et l'intensité des douleurs. Miellye était toute en sueurs maintenant.

Elle jugea plus sécuritaire de retourner Moka dans son bers et alla l'y porter essayant de choisir un moment d'accalmie.

Quant aux petits, ils étaient mieux de demeurer dans le parc puisqu'à présent ils descendaient tous seuls de leurs nichettes. Elle leur apporta dans le parc, les cadeaux offerts par Béli . Les enfants les adoraient et ils pouvaient jouer des heures avec ourson et poupées.

Il ne restait qu'Arnold, mais Miellye était à présent incapable de le soulever assez haut pour le hisser dans le parc et comme il aimait bien la suivre partout...

Elle réussit à amener des serviettes, des linges et plaça quelques couvertures de seconde main sur le lit lorsque cette fois, elle sentit que l'enfant poussait.

Elle reprit ses respirations, s'allongeant sur le lit pendant qu'Arnold s'esquintait à sauter à répétitions afin de rejoindre Miellye....

Noctuel approchait de la grotte à grandes enjambées. Il avait hâte de retrouver son épousée. Quelle ne fut pas sa surprise d'apercevoir, sur un tronc d'arbre mort situé à quelques pas de la grotte... un oiseau blanc. Ah! ça alors se dit-il, cela ressemble fort à Céleste... mais non, la chose ne se peut, Céleste a mis le cap vers le nord il y a plusieurs jours, c'est sans doute un oiseau similaire. Puis, il aperçut la marque du sang sur les plumes du volatile, la marque du sang de sa marraine... Il poussa un cri, et l'oiseau s'envola majestueusement...

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Noctuel entra dans la grotte avec grande agitation, voulant faire part de la nouvelle à Miellye. Mais que diable faisait-elle au lit avec Arnold????

Lorsqu'elle aperçut son époux si pâle et l'agitation dans lequel il était, Miellye haletait en compagnie de Dark qui croyait à un nouveau jeu de sa maitresse.

Noc… (souffle) tuel… qu'y a-t-il? (souffle) On dirait que… (souffle) tu as vu (souffle) un revenant ! (double souffle)

Elle était en nage et son visage se crispa sous le regard éberlué de son époux.

Un moment de répit lui permit de lui dire:

Noctuel, le temps de la récolte est arrivé mon époux. Il faudrait que tu places Arnold dans le parc en compagnie des petits. Moi… je n'ai pas pu!

Les douleurs se rapprochaient de plus en plus, l'immobilisant alors qu'elle aurait voulue aller se rafraichir.

Noctuel eut les yeux ronds, si ronds… lorsqu'il vit Miellye agrippée la couverture et serrer les dents qu'il s'empara immédiatement d'Arnold pour aller le porter dans le parc en compagnie des petits qui s'amusaient avec ourson et poupées, si bien, qu'ils ne portèrent aucune attention à leur père.

Il appela Dark et le chargea de surveiller le parc, après s'être assuré que Moka allait bien.

Au passage, il remarqua qu'on avait mis de l'eau à bouillir.

Lorsqu'il revint auprès de son épouse et aperçut les serviettes et linges qui étaient placés à ses côtés, il réalisa…

Il allait à nouveau être père!!!

Noctuel était estomaqué. Pourtant il n'aurait pas dû, la mi-février était bel et bien arrivée... cet événement était prévu, planifié, attendu...

Je-je-je... du ca-ca-calme Miellye, tout-tout-tout est sous contrôle, je-je-je sais tout à fait quoi faire, j'ai-j'ai-j'ai l'habitude.

Lui qui se considérait comme un homme sage, voilà qu'il devait se transformer en sage-homme... La journée risquait d'être longue.

À l'extérieur, on entendait nettement: Hooo-huh, hooo-huh, hooo-huh, wuh wuh wuh...

Miellye le regarda les joues gonflées, haletante…

Il avait l’habitude? Mais elle n’avait accouchée qu’une seule fois!

Elle entendit comme une sorte de hululement… Qu’était-ce? Céleste? Noctuel n’était pas allé bûcher mais à la recherche de Céleste? Et… de toute évidence, il semblait qu’il l’avait rattrapé

Elle se crispa davantage, cette fois, la douleur était persistante et elle sentit son enfant s’engager dans le couloir de la vie! Cette vie qui l’appelait...

L’enfant semblait pressé d’être accueilli dans sa famille.

Elle retint un cri pour ne pas faire peur aux petits et cette pensée l’inquiéta.

Noctuel (souffle) les-les-les petits (souffle) Mo-o-o-ka!

Une petite accalmie s’installa. Elle crut pouvoir se lever, essayant de se redresser, mais en vain….

Noctuel se concentrait, il fallait qu'il se rappelle les procédures qui avaient été mises en place l'an dernier par le docteur JR, pour la naissance de Noctumiel, Grazielle et Imeldine. Mais il y avait une différence, le bassin n'était plus là. Donc, il concentrait sa mémoire sur la dernière naissance, qui celle-là avait eu lieu à l'air libre. Il regardait l'eau qui bouillait... l'eau... sa fonction déjà?... Ah oui, l'eau bouillante... Il y plongea avec détermination tous les couteaux de la grotte!

Moka pleurait, il la prit dans ses bras et l'approcha de Miellye, se demandant si peut-être, pendant une accalmie...

Noctuel eut raison!!! L’instinct maternel et protecteur de Miellye lui fit prendre Moka dans ses bras et la placer contre son sein.

Elle la regardait boire et sourit en pensant que bientôt, une autre petite bouche affamée réclamerait son du elle aussi.

Les succions et les bruits de satisfactions de sa fille eurent un effet apaisant sur Miellye.

Soudain, elle relâcha l’étreinte de ses bras qui entouraient la petite. Moka retomba à ses côtés sur le lit, criant à pleins poumons sa contrariété.

Miellye sentit l’enfant qui se débattait, resserrant ses petites épaules pour se frayer un chemin. Il regardait droit devant lui et fonçait à grands coups de tête, s’engageant à présent dans le corridor le menant à l’extérieur de la prison fœtale dans laquelle il s’était formé pendant près de neuf mois.

Il voulait vivre! Il voulait voir cette femme qui l’avait conçu et porté tout ce temps et qui lui avait répété combien de fois à quel point ils l’aimaient déjà!

Cet homme dont elle lui avait si souvent parlé. Cet homme qu’elle lui confia être son père. Entendre sa voix… Il allait enfin entendre sa voix! Sa voix lui était si douce…

Que de conversations ils avaient déjà eus ensemble, que de confidences jalousement confiées dans les heures nocturnes, seuls tous les deux lorsque parfois elle ne dormait pas quand il cherchait à attirer son attention.

Une lueur… une lumière au bout de cet étroit corridor… Oui! Il lui sembla que c’était bien la direction à prendre le menant dans les bras de son père, sa mère étant occupée à lui donner la vie.

Mais la route était longue et pénible... Ce sentier si restreint…

Parfois, la route devenait plus étroite, alors il se fâchait, faisant une brève pause pour reprendre quelques forces puis, s’entêtait à nouveau à foncer plus avant.

L’enfant aurait-il déjà le tempérament de sa mère???

Miellye était en nage, ses forces diminuaient. Tantôt sourcillante, tantôt reprenant sa respiration… elle n’était plus en mesure d’allaiter Moka. Malgré tout, elle supplia Noctuel du regard de laisser la petite à ses côtés.

Noctuel était étonné de voir son épouse tantôt presqu’agonisante, tantôt forte et puissante. Tout cela le dépassait même s’il avait déjà connu les angoisses de la naissance.

À présent, Miellye n’entendait plus rien… Un coup d’épaule, un coup de tête, des coups de pieds le propulsant vers le but ultime de tous ces effots.

Soudain elle ne put retenir ce simple cri, parmi ses larmes et ses sourires, heureuse de bientôt tenir son enfant dans ses bras… ce nouvel inconnu qui lui était déjà si familier.

Noccccccc-tuuuuuuu-elllllllllll !!!!

Le petit s’opposa férocement à quelque chose qui rebondissait lorsqu’il donnait des coups de tête.

Aussi, tel un bouc, il se recula, ramassa toutes ses petites forces et fonça droit devant pour donner un très grand coup…

Mais… mais… qu’est-ce que c’était que ça???????

Il se retourna, entendant un grondement puis il ferma les yeux et la bouche regardant cet océan se diriger vers lui et qui le poussa plus avant pendant que Miellye inondait le lit….

Sans doute l'enfant et la mère poussèrent-ils exactement au même moment... En cinq secondes, tout était terminé, un petiot tout neuf avait émergé comme ça, tête, épaules, bassins et pieds... Noctuel lui donna une petite tape dans le dos, ce qui le poussa à respirer et à vocaliser... Il était un peu gluant, et comme enrubanné... Ah! oui, l'eau bouillante, le couteau! Noctuel coupa le cordon comme un vrai sage-homme qu'il était, puis en noua les extrémités. Avec un linge propre, il essuya le garçonnet, puisque c'en était un, et le déposa sur le ventre de Miellye, elle-même surprise d'un dénouement si rapide, et somme toute pas trop ardu.

On entendit alors la voix flûtée de Noctumiel, qui criait : INO, INO, INO, comme s'il appelait par son nom son premier petit frère...

Lors d’un court moment de répit, Noctuel aidait son épouse à retirer ses braies, lorsqu’elle fut saisit d’un violent spasme qui la secoua! Elle venait de rompre les eaux…

Noctuel la recouvrit d’une couverture qu’il redescendit sur ses jambes maintenant écartées, les pieds bien appuyés sur les barreaux placés au pied du lit.

L’enfant déployait démesurément ses efforts… inconscient des douleurs occasionnés à sa mère mais déterminé à conquérir le monde, il fonçait toujours et encore droit devant!

Depuis que la mer de la liberté l’avait propulsé vers les rivages de la délivrance, le poupon, armé d’une persévérance innée et pourvu d’une résistance à toute épreuve, faisant fi de tous les inconvénients causés à sa mère, dans un dernier effort, se propulsa vers les bras paternels tendus, gonflés de fierté et prêts à cueillir cette nouvelle récolte, fruit de nombreuses semences.

Il était si heureux de connaître enfin, l’homme dont sa mère lui avait tant parlé et qui s’était adressé à lui à quelques reprises.

Mais il était si nerveux lorsqu'il l'attrapa et eut si peur de l'échapper, qu'il le tapa!

Étonné, l'enfant lui pardonna sa maladresse, puisqu'il ressentait lui aussi une nervosité gigantesque digne de celle que ressentait celui qu’il appellerait un jour : Papa!

Il voulut lui montrer qu’il l’aimait! Aussi poussa-t-il son premier cri d’amour à son endroit en poussant sa première ritournelle à fort cri, emplissant ses poumons d’air alors que son père, l’affranchit du dernier lien le reliant encore à l’antre maternel.

Puis, cette chaleur! Cette douce chaleur qu’il reconnut et puis, ces bras… ces bras qui l’étreignaient comme une petite chose fragile alors qu’il se sentait herculéen étant parvenu à prendre d’assaut le monde!

Alors, lorsque ses lèvres détectèrent le sein maternel, source d’amour, de tendresse et de satisfaction, il redevint tout petit et fragile replié sous les ailes protectrices maternelles et il sut alors, qu’il l’aimait. Il aimait la première femme de sa vie : sa mère!

Miellye tenant fièrement son deuxième fils entre ses bras blottit contre la chaleur de son sein, se tourna vers son époux, épuisée mais souriante, heureuse que tout se soit si bien passé et si rapidement.

L’amour qui tanguait dans ses yeux, semèrent la confusion dans ceux de Noctuel qui, très fier de lui et de son rôle de sage-homme, bomba le torse en rougissant lorsque son épouse prononça d’une voix étrangement douce ce simple mot :

Merci !

Elle sourit, regardant Moka qui dormait paisiblement à ses côtés malgré tout ce brouhaha lorsque soudain, elle éclata de rire lorsqu'elle entendit Noctumiel, se pratiquant à interpeler son petit frère comme s’il savait qu’il était enfin arrivé…

Miellye reposait calmement, les deux nourissons plaqués sur la poitrine. On aurait presque dit que Moka et Pépinot (le nom choisi il y a belle lurette par Noctuel et Noctumiel) se tenaient par la main, mais c'était sans doute une illusion d'optique.

Le fier papa profita de ces moments de tranquillité pour laver la literie, pour ranger couteaux et marmites, pour remettre un peu d'ordre dans la grotte et pour nourrir les "grands" petiots. Ceux-ci étaient manifestement très intéressés par leur petit frère et leur petite soeur, et ils auraient voulu s'en saisir immédiatement pour les faire jouer. Noctuel dû mettre le hola à ces intentions ludiques, expliquant à Noctumiel, Grazielle et Imeldine que ce n'était que partie remise. Ils se rabattirent alors sur le dernier chaton, qui fit gros dos et émit un sillement de mécontentement. Bientôt, ce petit félin allait partir lui aussi, comme Ambre venait de le faire...

Noctuel avait pris son rôle de sage-homme très au sérieux et avant que son épouse se repose, il l'avait aidée à faire se rafraichir et à revêtir une tenue de nuit propre avant qu'elle ne tombe de sommeil.

Lorsqu'elle se réveilla, elle eut l'impression d'avoir dormi pendant des heures! S'inquiétant de ne pas voir les bébés à ses côtés, Noctuel la rassura en lui disant qu'il les avait portés tous les deux dans leurs bers pour lui permettre de se reposer sans être dérangée.

Miellye lui sourit et le remercia de cette délicate attention. Vraiment, il était un amour!!!

À la demande de Miellye, il l'aida à se lever lorsqu'elle manifesta le désir d'aller voir les "grands" petits.

Tout le monde fut rassuré de revoir maman et se mirent à babiller à un rythme incessant afin d'informer leur mère qu'il y avait un nouveau d'arriver dans la famille.

Miellye riait de les voir si emballés alors que Noctuel revint portant fièrement dans ses bras les deux nourrissons qu'il tendit à son épouse.

Tous les "grands" pointèrent l'index en direction des bébés sous les yeux attendris des deux parents.

Après que tous les enfants furent couchés, Miellye vint prendre place auprès de son époux qu’elle trouva très concentré, penché sur le grand livre des recensements, plume en main.

Lorsqu’il referma son livre, Miellye prit la parole.

Noctuel, comme nous en avons plein les bras maintenant, j’ai pensé te suggérer quelque chose concernant le dernier des rejetons de Calicoquette.

Comme il est grand maintenant et très débrouillard, que dirais-tu si tu allais le porter chez Alex. Premièrement, il pourrait chasser les chauves-souris en son absence. Deuxièmement, ce serait un cadeau de notre part, compensant pour la perte d’Arnold que tu t’es toujours refusé à lui remettre.

Tous les matins, lorsque tu partiras pour bûcher, tu pourrais passer lui porter à manger au cas où il ne mangerait pas à sa faim en l’absence d’Alex et remplir son bol d’eau fraiche.

Il nous faut un peu élagué, ne me l’as-tu pas suggéré toi-même il y a quelques temps?

Une chose est certaine Noctuel, c’est le chaton ou tu lui rends Arnold!

Le jeune chat ne se fit pas prier... Il rasait les murs depuis que les petiots l'avaient baptisé "bébé" et avaient même décidé de le langer... À l'appel de Noctuel, il fut donc trop content de prendre le sentier menant à la maison de dame Alexandra.

Noctuel passa un coup de balai, aménagea un coin douillet pour le petit félin, lui assura un apport d'eau et le laissa dans son nouvel empire, où il semblait tout à fait heureux.

Au retour, Noctuel aperçut Coquille qui grattait le sol de façon frénétique. Il s'approcha pour observer une scène qui le laissa bouche-bée... Voyait-il vraiment ce qu'il croyait voir?? Une tortue pouvait donc pondre des oeufs??? Il alla prévenir Miellye, pour le cas où elle aurait voulu marcher un peu au grand air et prendre connaissance d'un fait si étonnant...

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Ahhhhhhh, non! Noctuel, cesse de boire de ce genepi que tu as reçu en cadeau!

Elle ne peut pas avoir pondu d'oeufs... heu... tu as caché un mâle quelque part toi? Où tu l'as mis?

Voilà qu'on élague le chat, tu nous ramène Céleste et nous voilà avec des oeufs de tortues!

Et quoi d'autre encore????

Justement, le mâle, j'allais y venir! Cet épisode démontre à l'évidence que tu nous as ramené récemment, dans le seau... une tortue gravide!!! Donc, le père est resté dans la forêt, et il cherche peut-être désespérément sa conjointe. Décidément, il faut que je parte à sa recherche!

Noctuel allait joindre le geste à la parole, quand il sentit une main le saisir au collet... celle de Miellye...

Bon, bon, Miellye, d'accord, je renonce à retrouver ce "tortu"... Les tortillons devront donc vivre sans leur père, c'est peut-être possible chez cette race... Pour ma part, j'entends pleurer mes rejetons, il vaut mieux rentrer maintenant...

Bahhh, oui! Voilà qu'à présent c'était sa faute si madame tortue avait des oeufs! De plus, elle se faisait acccusée d'avoir omis de rapporter papa tortu!

Miellye s'était approchée de l'enclos de Coquille afin de constater, incrédule, les affirmations de son époux.

Dans un sursaut d'énergie, elle agrippa Noctuel par le collet, puis le relâcha presqu'aussitôt pour retourner dans la grotte dès que Noctuel prétendit entendre pleurer ses rejetons. Ce qui était faux, naturellement!

Elle se sentait lasse et à nouveau fatiguée. Elle regagna son lit en maugréant contre son époux. Décidément, son époux avait parfois le don de la faire sortir de ses gongs!

De toute façon, ça ne compte pas puisque ce ne sont pas des êtres vivants "DANS" la grotte!

Elle se glissa sous les couvertures, mettant ainsi fin au sujet! Noctuel la rejoignit quelque peu hésitant à se glisser à ses côtés mais tout aussi épuisé par cette interminable journée.

Pépinot réclama à boire deux fois pendant la nuit et au petit matin ce fut Moka

Miellye demeura debout et prépara le petit déjeuner des plus grands afin que le nouveau papa puisse se reposer un peu et manger tranquillement son premier repas de la journée lorsqu’il se réveillerait.

Les odeurs qui se dispersaient dans la grotte, vinrent éveiller l’odorat de Noctuel qui s’habilla rapidement pour rejoindre Miellye et les petits.

Lorsqu’il s’assit à table, Miellye déposa une assiette bien remplit, contenant des lardons de lard fumé bien cuits, quelques tranches d’oranges pelées, des petits pains réchauffés et deux gros œufs tournés!!!

Noctuel en demeura figé quelques instants puis sortit de la grotte précipitamment pour se diriger vers l’enclos de Coquille.

Bien que fatiguée, Miellye fredonnait une chanson, un sourire malicieux dans les yeux.

Noctuel partit pour le village, puisqu'il devait travailler en ce jour comme maréchal, sous l'égide du valeureux Max. Il apporta avec lui son épée, qui ne servait généralement qu'à trancher le pain, ainsi que son bouclier, qui portait encore des traces de miettes.

En faisant route, il vérifia l'état du chaton laissé chez dame Alexandra. L'animal semblait tout à fait heureux dans son nouvel empire, et il ronronnait vigoureusement.

Noctuel profita de son passage à Forcalquier pour placer une annonce aux halles annonçant l'arrivée dans la famille de Moka et de Pépinot.

Les enfants jouaient tranquillement, pendant que Moka et Pépinot se rassasiaient au bar laitier maternel.

Les filles, Grazielle et Imeldine, arrivèrent en pleurs devant leur mère suivies de Noctumiel qui tenait fermement leurs poupées dans les mains.

Miellye sourcilla et se leva pour aller remettre Moka et Pépinot dans leurs bers, leur boire étant terminé.

Lorsqu’elle se retourna, Noctumiel lui tendit les poupées et lui montra la chaise du doigt.

Miellye sourit et comprit… les poupées avaient soifs!

Calmement, elle prit les poupées et les blottit contre sa poitrine, les cajolant tout comme elle le faisait pour les nourrissons.

Les pleurs cessèrent et les filles, embrassèrent Noctumiel pour le remercier d’avoir pensé à faire boire leurs poupées.

Noctumiel, très fier de lui, gonfla sa petite poitrine et afficha un sourire des plus satisfaits!

Miellye le regarda et sourit à son tour, s’imaginant son époux se tenant devant elle, transformé en Noctunain!